Longueur acoustique, longueur réelle et ventres fictifs
D'où vient dans les calculs de diapasons de nos flûtes qu'il existe une différence entre la longueur acoustique théorique et la longueur réelle?
C'est parce qu'il existe un phénomène particulier: les ventres fictifs en raison du rayonnement.
En effet un tube possède une fréquence propre (avec des harmoniques) fonction de sa longueur entre deux extrémités ouvertes, partiellement ouverte pour une bouche ou encore fermé pour un bourdon. Il résonne en fonction de la fréquence du vortex et donc amplifie la fondamentale et ses harmoniques qui s'accommodent ou plutôt s'accordent alors sur celle du tube.
Pendant le temps de la transition l'ensemble passe d'un régime dit buccal à un régime stabilisé qui eux n'ont pas les mêmes partiels ou harmoniques même si généralement on cherche à avoir une même fréquence proche pour la fondamentale.
Une fois stabilisé l'analyse spectrale met en évidence des décalages entre les harmoniques théoriques et les partiels réels, car la longueur "apparente" pour chaque fréquence est elle aussi différente pour chaque fréquence de chacun des harmoniques et qui donc devient un partiel. La théorie devient fausse et la fréquence est celle d'une longueur "fictive calculée" que l'on appelle par la suite "réelle" de quoi se mélanger les pinceaux...
Pour reformuler les bases il faut se remémorer les phénomènes en connus en cause, en relisant :
La physique des tuyaux d’orgues
paramètre sensibles d’un tuyau d’orgue (bulletin N°42 du LAM)
Longueur acoustique d’une flûte ouverte et coudée
et y rajouter la notion de ventre fictif, le présent article
ondes stationnaires ou l’article
spectre d’une note ou l’article
Mais surtout l'article suivant: rayonnement et propagation
Extrait:
Le rayonnement, c'est le raccordement d'une onde plane à l'intérieur du tube qui rayonne dans l'air ambiant en se transformant en une onde sphérique. Ce phénomène est tellement compliqué à expliquer et mesurer que Harold Levine et Julian Schwinger deux chercheurs en physique ont en 1948 obtenu une récompense honorifique pour leurs travaux sur le sujet qui trouvent des applications dans le vaste domaine des ondes sonores et électromagnétiques (par exemple dans les antennes).
Ce phénomène est d'autant plus influant que le diamètre est grand.
On doit donc distinguer la longueur physique et la longueur acoustique qui se déduisent l'une de l'autre en fonction de la correction du diamètre (ou de la profondeur). Cette notion est souvent signalée dans les expériences sous le terme de "ventre fictif". L'ordre de grandeur est de 0.61 fois ce diamètre.
Cette notion est complexe et donc difficile non seulement à comprendre, mais aussi à expliquer, et les erreurs d'interprétations sont nombreuses y compris parmi les ouvrages qui tentent de l'expliquer...
Un exemple criant est celui de l'ouvrage "vibrations mécaniques acoustique" de l'éditeur Eyrolles page 245 pourtant paru entre 1955 et 1959 sensé enseigner cette notion:
Non seulement la figure est fausse mais le texte dit l'inverse ce qui fait que la formule est exacte mais à l'évidence les auteurs n'ont pas compris alors qu'ils écrivent un ouvrage destiné à l'enseignement!
En effet selon la figure le point O est dans le corps de flûte et donc la longueur théorique y est plus courte et non plus longue donc il y a contradiction entre le texte et la figure.
L'énergie des ondes depuis ce point fictif O vont d'une part se réfléchir vers le corps de flûte pour produire la fondamentale et ses harmoniques et donc utiliser cette énergie pour les produire et les entretenir, et d'autre part le reste d'énergie des ondes depuis le point O vont transmettre le son vers l'extérieur pour atteindre nos oreilles.
De plus, les mouvements de l'air dans la zone de l'extrémité d'un corps de flûte ne sont pas simplement des oscillations avec une forme d'onde symétrique entre l'entrée et la sortie de l'air, mais des pulsations de formes différentes entre la sortie qui est un jet d'air comme à la sortie d'un canon et la rentrée qui est diffuse et aspire l'air de toute part autour de cette extrémité.
D'ailleurs ce phénomène a lieu d'un coté à l'extrémité d'une flute ouverte en l'absence de tampon, mais aussi du coté de la bouche plus ou moins ouverte du coté du noyau des flutes ordinaires et en plus avec un coude ou phicophones justement sans le coude.
on comprend mieux pourquoi les physiciens et les acousticiens peinent à observer, comprendre , analyser pour prévoir, en mettant en équation ce phénomène vibratoire qui ne peut se décrire comme une simple oscillation des molécules de l'air autour d'une position moyenne, en faisant comme on le voit parfois, un parallèle avec un oscillateur électrique et une onde sinusoïdale théorique trop éloigné des conditions réelles rencontrées dans nos flûtes.
C'est une erreur courante dans les thèses actuelles qui n'est même pas relevée par l'équipe de validation pourtant composée d'experts...
A l'image de l'erreur courante qui consiste à poser comme préalable qu'un régime est laminaire et trouver des valeurs calculées qui sont à l'évidence tellement élevées, que le régime est certainement turbulent.
Ou l'extraordinaire habitude qui consiste à parler de "la vitesse de sortie de l'air à la lumière" comme une constante uniforme pour toutes les flûtes d'un jeu alors qu'il y a des vitesses différentes pour différents endroits et différentes pour chaque flûte et différentes en fonction de la phase..
revoir l'article sur la loi de Bernoulli et ses correctifs.
Cela fait pas mal de raisons pour penser que les thèses actuelles sur le sujet sont encore truffées d'erreurs qui seront un jour rectifiées par des étudiants assez audacieux pour remettre en question les affirmations de leurs ainés et même de leurs professeurs.
La pulsation explique aussi pourquoi on peut observer par strioscopie qu'un vortex stabilisé du coté de la bouche, passe plus de temps en dehors de la bouche qu'en dedans, à chaque période, car il est chassé avec plus d'énergie pour en sortir et de façon plus diffuse à la rentrée donc avec moins d'énergie.
Le timbre d'une flûte est influencé par les harmoniques. Par exemple les bourdons ne présentent que les harmoniques impaires, alors que les flûtes ouvertes ont un contenu harmonique qui contient les fréquences paires et impaires.
La conclusion du graphique du passage ouvert à fermé nous montre aussi que l'allongement fictif du corps de flûte est aussi fonction de la fréquence des harmoniques (ou partiels) car on visualise que pour un bourdon ils sont plus aigües que les harmoniques théoriques, alors que dans une flûte ouverte ils sont plus justes.
D'un autre coté on pouvait penser que le fait de n'avoir que les harmoniques impairs réduisait les risques de discordances dans les accords avec les bourdons. En fait le risque de discordance est plus grand avec les bourdons plutôt qu'avec des flutes ouvertes ou des phicophones dont les harmoniques sont plus nombreux mais plus justes.
Mais il y a aussi une correction de second ordre nécessaire pour tenir compte du ralentissement de la propagation des ondes dans le tube par frottements sur les parois. C'est ce que l'on nome la propagation.
Ce phénomène est d'autant plus influant que le diamètre est petit et la fréquence basse.
Il est peut-être aussi fonction de l'état de surface de l'intérieur du tube.
Remarques personnelles
l'échelle choisie montre une très nette influence des fréquences basses mais un coup d'œil sur la variation de vitesse relative de phase montre que la variation est réduite au passage de 99.5% à 97.5% de l'effet visco-élastique sur la célérité soit 2%.
L'effet n'est nettement sensible que pour des diamètres très petits (en deçà de 10mm) ce qui ne se rencontre que pour des flûtes dans l'aigüe et jamais pour une basse.
En conclusion si l'on prend 4 tubes :
deux longueurs (par exemple 30 cm et 3.0 m) et deux diamètres différents (1 cm et 4 cm):
quel sont les critères qui vont faire que les tubes sonnent plus ou moins grave?
-Dans le couple des deux tubes courts le plus grave est celui qui a le plus grand diamètre car le rayonnement est prépondérant et sa longueur acoustique semble allongée de deux ventres fictifs de 0.6 fois le diamètre aux extrémités ouvertes.
-Dans le couple de deux tuyaux les plus longs le plus grave doit être celui qui a le diamètre le plus petit si la propagation est prépondérante et sa longueur acoustique semble allongée en raison du retard généré par les frottements sur les parois.
Ces corrections sur la longueur acoustique sont donc difficiles à calculer et sont facilement rattrapées par les variations du tampon ou du système d'accord à condition d'avoir des sur-longueurs initiales suffisantes. les corrections sur le timbre étant alors plus ou moins prises en compte par la progression qui est elle-même aussi progressive.
De plus leurs effets sont opposés et donc peuvent se compenser dans une large fourchette de longueurs. Le rayonnement et la propagation sont donc difficiles à isoler (puisqu'ils sont produit simultanément) et les mettre en évidence demande à examiner dans les extrêmes c'est à dire le plus grand diamètre pour les longueurs les plus petites, et le plus petit diamètre pour les plus grandes longueurs ...
Or nos flûtes basses sont toujours de grand diamètre, donc la propagation n'y intervient que peu et nos flûtes aigües sont systématiquement de longueurs courtes donc la propagation y sera toujours négligeable.
Par contre l'influence du rayonnement sera évidente même à l'oreille d'un auditeur ordinaire pour le couple de tubes courts.
Le rayonnement sera aussi plus important pour des flûtes ouvertes que pour des bourdons, ainsi que pour des flûtes phicophones par rapport à des flûtes traditionnelles puisque leur bouche est plus ouverte.
Benoit Fabre nous l'explique dans cette vidéo entre 27' 50" et 33'08" justement sans utiliser un couple de tubes longs.
Cette problématique est aussi abordée par d'autres avec des calculs différents mais cohérents: l'exemple de Johan liljenkrants.
quelques vidéos complémentaires:
méthodes des tranches Lagrangienne
Euler - Lagrange dérivé particulaire
Quelques thèses qui vont plus loin:
les trois notions à distinguer mais à comprendre simultanément:
1 le rayonnement et la propagation (le présent article)
3 les ondes stationnaires, la résonance et le déphasage
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